Rouge : Le livre de Pascaline Nolot

Voici un livre qui figurait dans ma PAL depuis un moment. Et à ma lecture, je me suis demandée pourquoi je ne l’avais pas commencé plus tôt. Parce que je ne suis pas loin du coup de cœur. Nous entrons ici dans un conte qui en revisite d’autres. Attention cependant, nous ne commençons pas par “Il était une fois”, ni ne finissons par “Ils se marièrent et vécurent heureux”. Non, d’entrée de jeu on entre dans l’ambiance du livre, sombre, horrible, on comprend que l’histoire sera tragique. Rouge, le prénom d’une enfant martyr (sur)vivant dans un village perché et isolé sans époque (mais moyenâgeux) et ceint par les bois. Malombre cerné par Bois-sombre. Rouge dit aussi la Cramoisie, la Rougeaude ou tout autres surnoms évoquant sa tâche lie de vin qui lui mange la moitié du visage et du corps. Afin de dissimuler aux yeux de tous sa difformité, elle porte une cape (rouge, vous vous en douterez) munie d’une énorme capuche. Petit chaperon Rouge. Rouge rejetée par le village tout entier excepté par son ami, Liénor, et le Père François. Même son père la rejette, évidemment … elle est la cause de la mort de sa mère. Mère accusée d’avoir couchée avec le démon pour enfanter. Mère devenue folle, la raison de sa folie est sordide, on ne peut que compatir et souffrir avec elle. Rouge, qui doit quitter le village au premier sang, comme toutes les jeunes filles de Malombre le jour de leurs premières règles. Seulement pour son départ le village est en liesse, heureux de se débarrasser de ce monstre. Quitter le village pour aller chez Grand-Mère habitant Bois-sombre. Rouge, est accompagnée par les loups envoyés comme escorte par Grand-Mère, comme toutes jusque-là. Mais qu’advient-il de ces jeunes filles qui ont l’obligation de visiter la locataire de la forêt, puisqu’aucune n’est jamais revenue ? Rouge, sur le chemin, rencontre le chasseur, mais quelle est sa véritable nature ? Son comportement est loin d’être sain envers Rouge. Rouge, qui découvre le secret terrible de ses origines grâce au miroir qu’elle trouve chez Grand-Mère et qui veut se venger. Rouge qui se reconstruit. J’ai beaucoup aimé l’histoire de ce conte moderne, je la vivais en même temps que Rouge, j’avais envie de me battre à ses côtés, de faire comprendre qu’une marque de naissance n’est pas celle du diable, de faire taire ses croyances populaires d’un autre âge. L’envie de venger sa mère de l'ignominie qu’elle a vécu. Sentir une rage monter au fil des mots. En cela, cette lecture peut être difficile voire déconseillée pour certaines personnes. Ce qui m’empêche de mettre un coup de cœur, c’est l’inconstance de l’écriture. Par moment, l’écriture se rapproche de celle de l’époque envisagée et par d’autres nous sommes dans une écriture plus moderne. Cette alternance des styles est perturbante et c’est dommage. Ce qui fait en partie la force de ce roman est le panel de sujets qu’il aborde, il y est question du rejet de l’autre pour sa différence, de croyances qui animent la vindicte populaire, de condition féminine, de violences sexuelles, d’acceptation de soi, de résilience. Des thèmes forts, bien amenés jusqu’au dernier paragraphe du livre qui, je l'espère, vous surprendra comme moi. Lecture que je conseillerai à nos lecteurs à partir de 15 ans.

« Rouge » c’est le nom qu’on a donné à cette jeune fille dont la moitié du visage n’est qu’une tache rouge, signe certain du diable qui l’habite comme il a habité sa mère, morte en couches. Rouge vit dans l’écurie. Elle est insultée, frappée, moquée sans cesse. Elle est le bouc émissaire de ce village perdu et cloîtré sur lequel pèse la malédiction d’une sorcière qui réclame chaque jeune fille devenue pubère. Elle n’a qu’un seul ami, Liénor, mais ce dernier a l’interdiction de la toucher sous peine d’être contaminé par le Mal. Un jour, c’est au tour de Rouge de se rendre chez la sorcière… « Rouge » est donc une réécriture du Petit Chaperon rouge. On y croisera d’ailleurs des loups, une grand-mère, un chasseur ou encore le panier garni de la galette. Mais la comparaison s’arrête là. Rouge incarne celle qu’on rejette parce qu’elle est différente et sur laquelle on fait peser tous les malheurs. Je n’ai pas aimé la première partie du roman que j’ai trouvé trop exagérée en tout. Rouge concentre toute la haine des villageois. Elle est sans cesse humiliée et battue. C’est d’une cruauté sans nom d’ailleurs. J’ai trouvé cette partie assez caricaturale, sans nuance. En revanche, la seconde partie m’a davantage emballée. Rouge se rend alors à son tour chez la sorcière. L’intrigue devient plus dynamique, plus violente. Au-delà du conte, le roman parle de discrimination mais aussi de la place des femmes dans la société, éternelles perdantes face aux hommes. L’épilogue du roman m’a énormément plu et m’a réconciliée avec le reste. Je n’ai qu’un seul regret: le style de l’autrice auquel je n’ai pas du tout accroché. Je l’ai trouvé très ampoulé, suranné et descriptif. C’est vraiment dommage. « Rouge » est un roman très intéressant qui redynamise le genre du conte en abordant des thèmes très actuels.