Joujou : Le livre de Ève de Castro

Cette biographie romancée retrace le parcours de Joujou, alias Joseph Boruwlaski. Né en 1739 en Russie polonaise, Joseph a la particularité d’être nain, un nain bien proportionné, « une réduction d’humain » diront les uns, « un lilliputien égaré sur nos terres » diront les autres, une malédiction pour certains, un miracle incarné pour d’autres. Mais pour Mme de Caorliz, il représente un adorable bichon, intelligent et affectueux, et un excellent faire-valoir pour attirer les gens de la bonne société. Elle n’aura aucune difficulté à convaincre sa mère, tombée dans la misère, à le lui confier. Ainsi débute pour Joseph une longue carrière de nain de salon qui va s’étendre sur près d’un siècle et l’amener à parcourir les grandes Cours d’Europe comme l’Autriche, la France, l’Angleterre. Son sort sera-t-il pour autant plus enviable que celui d’un nain de foire ? Ce qui est bien rendu, c’est la suffisance ancrée dans les gènes d’une classe sociale qui n’estime pas agir pas avec méchanceté envers ce nain, bien au contraire, mais qui ne le considère tout simplement pas comme un être humain à part entière avec des sentiments, des émotions. Il est traité avec toute la bienveillance d’un jouet fascinant, au mieux d’un animal de compagnie. La scène où ces grandes dames envisagent de l’accoupler pour avoir une portée de nains est assez hallucinante ! En parallèle, nous découvrons cette noblesse et ses mœurs à travers le regard de Joseph. Ce livre qui aborde la différence et les préjugés est raconté avec un certain humour qui nous cueille parfois par surprise. Néanmoins, si le contenu est intéressant, le style en revanche m’a moins enthousiasmée. Déjà, c’est écrit au présent, un temps narratif avec lequel j’ai toujours eu du mal à accrocher. Ensuite, les sentiments et pensées sont trop détaillées. Le narrateur extérieur est bien trop présent. Rien n’est suggéré, tout est énoncé, ce qui m’a souvent relégué à la place d’observateur. Mais je suis contente d'avoir découvert la vie atypique de Joseph.