La Mer : Le livre de John Banville

Ayant perdu sa femme du cancer, Max se remémore des souvenirs tout en méditant sur sa vie. À travers un monologue de plus en plus attachant, on découvre un personnage qui regarde ses contradictions avec humour. Il nous parle de ses premiers émois érotiques auprès d'une famille de voisins avec laquelle il partageait les vacances à la plage, de sa fille avec qui il se fâche, de vieux amis qui se révèlent à la fin, comme l'histoire des jumeaux avec qui il avait tant joué. Avec en toile de fond le deuil de sa femme. Un texte bien écrit, très sensible, truffé d'observations et de réflexions parfois cocasses qui rendent Max en fin de vie très humain.

Le Booker Prize- prix prestigieux accordé à une oeuvre de fiction écrite en anglais, et publiée au Royaume-Uni ou en Irlande a été accordé à La mer, en 2005. Son auteur, John Banville est un écrivain irlandais, qui a publié plusieurs romans, ainsi qu'une série de romans policiers - dont Dr Quirke, médecin légiste, est le héros - sous le nom de plume de Benjamin Black. Max Morden, la soixantaine, critique d'art, vient de perdre sa femme qui a succombé à un cancer. Max retourne à Ballyless, petite station balnéaire d'Irlande où il passait ses vacances, enfant. Il fait un séjour dans une pension de famille, Les Cèdres, là-même où il a connu la famille Grace, cinquante ans auparavant. Une rencontre avec Chloe et son frère Myles, enfants de son âge, et leurs parents, lors d'un été dramatique qui le marquera à jamais. Dans la Mer, c'est Max Morden qui prend la parole, et choisit de nous raconter trois temps forts de son histoire : il nous décrit son enfance, ses premiers émois face à Mrs Grace, la mère de Chloe, puis les sentiments qu'il éprouve pour la jeune adolescente. Puis il nous raconte la longue souffrance d'Anna, sa femme, depuis l'annonce de son cancer par l'oncologue, le Dr Todd (qui signifie mort, en allemand), sa femme qu'il a accompagnée tout au long de sa maladie. Enfin, Max nous dépeint la station balnéaire actuelle, ses retrouvailles avec Ms Vavasour, la gérante des Cèdres, qui possède quelques unes des clefs qui manquent encore à Max pour comprendre ce qui s'est passé cette année-là, pourquoi "le passé cogne en lui, comme un second coeur". J'ai lu avec beaucoup de plaisir ce roman à l'écriture poétique, qui décrit avec minutie les sentiments de Max, sa nostalgie de l'enfance, le deuil difficile des personnes qu'il a aimées, qui restent présentes dans sa mémoire. Les récits ne suivent pas une ligne chronologique et s'entremêlent au gré des souvenirs, heureux ou tristes de Max, leur offrant une coloration particulière. La mer est omniprésente : elle joue un rôle capital alors que Max est enfant, lors de la maladie d'Anna, et c'est vers la mer qu'il choisit de retourner.... Le texte original que j'ai lu en premier a été traduit par Michèle Albaret-Maatsch avec une grande virtuosité - l'écriture de John Banville - à la différence de celle de Benjamin Black - n'est pas toujours d'une approche facile ! Pour compléter la lecture du roman, je conseille de visionner le film anglo-irlandais, La mer, tourné par Stephen Brown en 2013. John Banville a participé à l'écriture de son scénario. L'acteur irlandais Ciarán Hinds joue le rôle de Max Morden, Sinéad Cusack, celui d'Anna, et c'est Charlotte Rampling qui incarne l'énigmatique Ms Vavasour. Une lecture envoutante.