L'impardonnable défaite 1918-1940 : Le livre de Claude Quétel

On peut s’interroger sur le titre de cette très documentée « impardonnable défaite ». Il me semble que le passage ci-dessous en livre remarquablement bien la substance : « Loin de toute malchance, la défaite de la France était inévitable, imparable, obligée. Elle n'a été ni fortuite, ni étrange. Ce fut une défaite annoncée, historiquement parlant, chaque année plus inexorablement - et ce dès 1918. Elle fut de facto préparée par la classe politique française, véritable microcosme coupé des réalités et se succédant sans cesse à lui-même, par les intellectuels pacifistes faisant le lit de l'agresseur, par l'appareil totalement sclérosé de l'armée et l'invraisemblable bêtise de son haut commandement. Ce n'est pas le moindre paradoxe que, dès ses premiers discours, Pétain demande au peuple français d'expier les fautes qu'il n'a pas commises. André Wurmser écrit : "Les Français ont été vaincus, c'est un fait. Ils ont surtout été couillonnés. Etourdis par le coup de massue de la défaite, ils eurent confusément conscience de la trahison (..) Le peuple n'est jamais le vrai coupable." On y apprendra que, contrairement à ce qu’on pourrait penser aujourd’hui confortablement assis dans son fauteuil, les soldats français se sont battus, et plutôt bien, et qu’ils en ont payé le prix. On ne manquera pas de relever que « la classe politique française, véritable microcosme coupé des réalités et se succédant sans cesse à lui-même » quatre-vingt cinq ans plus tard est toujours la même : une classe, pour ne pas dire une caste. Que «les intellectuels pacifistes faisant le lit de l'agresseur » ont été remplacés par des intelligences particulières qui se subliment en portant la voix agressive de pays et de populations qui ne nous veulent pas que du bien. Quant à l’armée, condamnée à être la Grande Muette, relevons simplement que lorsqu’un chef d’état major juge bon d’alerter le chef de l’état sur l’insuffisance des budgets, il est remercié sur le champ et sans ménagement. Cet ouvrage de qualité est donc réservé aux lecteurs qui n’ont pas peur de broyer du noir. Toutes ressemblances avec des faits, des situations ou des personnages contemporains ne me semblant pas aussi fortuites qu’elles le devraient, je le déconseille aux lecteurs qui souhaitent continuer à dormir tranquilles.