La nuit nous emportera : Le livre de Mahi Binebine

Au cœur de Marrakech, vit la famille de Mina. Sami, son petit dernier, celui qu’elle cajole encore un peu plus chaque jour pour faire durer le temps de l’innocence, nous raconte sa jeunesse. Qu’il s’agisse des jeux, des promenades dans les rues de la médina, ou de son séjour à la ferme de sa grand-mère, Sami est un petit garçon heureux. Jusqu’au jour où son frère Abel, qu’il aime comme ce père qu’il n’a pas connu, est enfermé dans les prisons royales pour avoir participé à la tentative de coup d’état contre le roi… Je découvre l’écriture douce et poétique de Mahi Binebine avec ce roman, La nuit nous emportera. C’est avec beaucoup de tendresse qu’il nous offre avec l’histoire de Sami et de sa famille, un voyage sur les terres marocaines, avec ses couleurs, ses odeurs, ses senteurs épicées et sucrées… Les mots chantants, délicats, nous entraînent dans les pas de cette famille marquée par les absences. Celle d’un père, d’un frère, et de cet amour dont on ne sait plus quoi faire. On y entend aussi tout le bonheur de cette cuisine qu’on aime partager, de ces contes qu’on aime raconter et de ces valeurs qu’on essaye de véhiculer, quelques soient les difficultés. Même si je sais déjà que l’histoire de Sami ne restera pas très nette dans ma mémoire, il subsistera la chaleur de cet amour filial, la douleur d’une mère et la douce mélodie de cette enfance enfuie…

C’est l’histoire d’une lente et douloureuse descente aux enfers pour cause d’un excès d’amour. Le narrateur est Sami, dernier-né d’une famille qui vit à Marrakech. Le père est parti depuis longtemps, brusquement, laissant les siens (femme, cinq enfants et servante) se dém… sans ressources ou presque. Abel, le frère aîné, le remplace un peu, dans le cœur des petits. Pour Sami, il est le plus grand, le plus puissant, dans son bel uniforme d’officier de l’armée, où il est entré. Puis la nouvelle éclate à la radio : il y a eu une tentative de coup d’État, l’armée a essayé de tuer le roi. L’opération est un échec, cependant, les soldats sont tous arrêtés et jetés en prison. Abel ne reviendra pas, c’est pour sa mère le début d’une chute qui durera une vingtaine d’années. La première partie du roman plante le décor, on se croirait vraiment dans l’ambiance d’une famille marocaine, on fond de la médina, avec les relations entre les gens, les tensions, les bonheurs, les petits et grands événements de la vie de tous les jours. Le seul problème, c’est que ça prend la première moitié du roman, et que c’est un peu trop long. Ce n’est pas qu’on s’ennuie, mais on n’est pas venus pour ça, et on attend que ça commence. La suite est poignante. La famille explose, tout ce qui faisait leur monde disparaît. Par quel miracle une certaine cohésion perdure-t-elle entre les personnages ? J’ai beaucoup aimé le style, très pur et très précis, et la descente, presque visuelle, dans les ruelles de Marrakech. Ce n’est pas un livre qui va bouleverser ma vie, toutefois, je suis content de l’avoir lu. C’est le second bouquin de Mahi Binebine qui passe entre mes mains, il y en aura d’autres. Merci à Masse Critique.

Petit garçon frileux, naïf et frondeur, Sami, le benjamin de la famille, nous raconte son enfance heureuse au coeur de la médina de Marrakech. La vie quotidienne s'organise autour d'une fratrie de cinq enfants, élevés sans père. Mamaya, leur mère, se bat seule, dans un monde dominé par les hommes, pour les nourrir et les éduquer. Abel, l'aîné, militaire prometteur, est en route pour une brillante carrière d'officier. Mais un jour, une voix venue du fond du monde annonce, sur une radio grésillante, le coup d'État contre le Roi, et l'univers de Sami bascule. Avec une écriture poétique, vivante, colorée et poignante, ce roman raconte, à travers les yeux d'un petit garçon rêveur, la douleur d'une mère face à l'absence d'un fils emprisonné et son impossible résignation. Mahi Binebine dépeint avec une grande sensibilité les petites choses du quotidien. On découvre un univers marqué par la débrouille, l'entraide, et la lutte pour survivre, mais aussi une famille riche de son amour et de sa solidarité où maîtres et domestiques sont proches. Et au centre de tout, il est impossible d'oublier le portrait émouvant de Mamaya symbole de toutes les mères courageuses. Un grand merci aux éditions Robert Laffont et Babelio pour leur confiance.