Une trop bruyante solitude : Le livre de Bohumil Hrabal

C'est Fahrenheit 451 chez les soviets ! Un récit inspiré du vécu de l'auteur tchécoslovaque, façon dystopie dans les régimes des autocraties administrées communistes. La satyre est d'abord déroutante, par l'excès d'ironie burlesque et sardonique, mais très vite on rentre littéralement dans le livre, comme Hanta depuis 35 ans, au propre et au figuré (livres qu'il pilonne en parvenant à en sauver de la destruction pour les cacher dans son antre). Les répétitions, les récurrences dans la narration, c'est la constance de la presse et de la répression. Difficile de sortir du livre, tant la presse oppresse et Hanta lui, fait le choix de l'impression face à l'oppression... J'entends encore ce pilon sanguinaire ouvrir les veines des livres et en purger les idées. A la fois farce et parabole, ce bouquin est un ovni indispensable a l'heure de la dictature de l'information désinformationelle.

Une réelle découverte que cet auteur et ce livre. Une écriture pleine de vie, truculente, maniant avec brio ironie, mélancolie, détachement et réalisme, sans jamais tomber dans le pathos. A consommer sans modération , une pinte de bière à proximité, comme le personnage principal du livre :)

Ce petit livre prend toute sa valeur quand on le ressitut dans le contexte de son écriture: Prague, avant la chute du rideau de fer; la liberté est limitée, les écrivains sous contrôle, et l’écriture est pourtant une des seules voies d évasion possible. Dans le cadre, notre héros quelque peu pathétique s’épuise à mette au pilon depuis 35 ans toutes sortes d ouvrages, des plus beaux ( la bibliothèque royale de Prusse ) aux plus sordides ( la littérature nazie ), en passant par des papiers sanglants émanant de boucheries… Entre deux mises au pilon, on découvre sa vie, étriquée dans son sous sol infesté de souris, mais dont la lecture et le soin des livres ont été les sources d évasion, ainsi qu’une aventure avec une jeune tzigane, le tout exprimé avec une pointe d’humour et de distance. J’ai eu un peu de mal avec le style de l’auteur, les répétitions, mais ce héros est néanmoins attachant, et révélateur de la chape de plomb qui s’est abattue pendant des décennies sur l’Europe de l’Est, où rêver était la seule échappatoire possible. Rien que cela, cet ouvrage mérite d être lu.