Le petit copain : Le livre de Donna Tartt

Le Maître des illusions et Le Chardonneret ont vraiment été des coups de cœur, et si j'ai mis du temps avant de lire Le Petit copain, c'était un peu par peur d'être déçue, en comparaison. À la lecture de ce roman, j'avais l'impression d'être à la fois chez Mark Twain et ses Aventures de Tom Sawyer et chez Michael McDowell, avec ses familles matriarcales qui s'affrontent. J'ai eu un peu de mal à situer l'action dans le temps. J'ai longtemps cru que ça se passait fin des années 60, car Donna Tartt y décrit un Mississippi toujours très raciste, où la seule personne qui ne le soit pas est notre jeune personnage principal, Harriet ; et plus le récit avançait (le roman fait près de 850 pages) plus je comprenais que ça se passait plus tard (il y a une référence à Star Wars dedans, donc plutôt fin des années 70). Mais finalement, quand je vois ce que donnent les États-Unis aujourd'hui, j'y retrouve carrément des personnages du roman donc malheureusement ce constat de racisme reste universel et n'est pas une valeur sûre pour dater les événements... Mais ça tombe bien, parce que cette histoire est avant tout une fresque sur les U. S. A., comme l'ont fait Twain et McDowell cités ci-dessus. Harriet a douze ans et suite à un prêche elle a l'idée de donner un but à son été : retrouver le meurtrier de Robin, son frère (pendu dans son propre jardin 12 ans plus tôt alors qu'il n'avait que 9 ans (et elle quelques mois à peine)), et se venger. Avec l'aide d'un camarade elle va très vite se faire une idée du coupable (même si à l'époque la police n'a jamais rien trouvé) et va mettre sa vengeance sur pied : elle veut le tuer grâce à un serpent venimeux. Ce fameux coupable est un jeune délinquant, issu d'une famille de délinquants, mais qui sont surtout très dangereux et versés dans la fabrication et le trafic de drogue. Harriet et son ami Hely vont se retrouver dans des situations qui semblent parfois désespérées... Donna Tartt est vraiment très forte pour décrire et nous faire ressentir des émotions, sensations, sentiments ainsi que les ambiances et atmosphères. Il y avait aussi un je-ne-sais-quoi d'effet feuilletonnant, car finalement plusieurs aventures et intrigues jalonnent ce fameux été. Il y a quelques digressions, mais qui permettent de vraiment se fondre dans le contexte, et malheureusement quelques coquilles aussi. Ce n'est pas un coup de cœur car j'ai été un peu frustrée qu'au bout des 850 pages on n'ait pas de réponse à la question qui ouvre le roman : qui a tué Robin et pourquoi ? J'imagine que le but n'était pas là car ce n'est pas un thriller, mais plus une photographie sociale d'un lieu donné à un moment donné : l'Amérique profonde, le Southern gothic, et de ce point de vue là c'est très, très réussi !