Stella et l'Amérique : Le livre de Joseph Incardona

C’est un livre très provocateur qui suit les pas de Stella, jeune femme prostituée en Amérique. Une jeune femme au charme fou et à la belle plastique. Une jeune femme qui est aussi une sainte et guérit les malades au moyen des plaisirs de la chair. On suit sporadiquement également les pas d’hommes et de femmes dans toute leur misère, leurs vices et leur laideur. L’atmosphère est absurde. Seulement, le livre est ouvertement anti-religion, cynique et clairement sarcastique. La vulgarité, à tous niveaux, y est prégnante. Nombre de phrases sont des critiques directes de références chrétiennes ou sinon de ce qui donne du sens et de la grandeur à notre société. Bien qu’animé par des convictions fortes et très idéaliste, je ne situerais pas ce livre comme dénué de valeur. Ce n’est pas mon livre préféré mais il apporte de la détente, une vision critique intéressante et une compréhension des dérives que l’excès de religion, d’idéalisme et d’écart par rapport à la réalité brute peut engendrer. Il y a une liberté de ton qui rappelle l’Amérique profonde. L’Amérique des stations-service, des mobile homes et des films hollywoodiens. J’ai apprécié dans ce livre la sensualité et la mise en valeur de la beauté des femmes, une beauté du quotidien. Par exemple, quand les gestes de Stella sont décrits avec précision et de façon crue dans des moments banals, comme triturer ses cheveux ou se baigner nue, est décrit un pan de la vie trop souvent oublié des écrivains car jugé pas assez poétique. Mon avis très personnel est que la « putain » Stella, malgré sa volonté de jouir sans entraves, conserve une part d’innocence. J’ai aussi trouvé que les traits d’humour noir étaient intelligents car originaux et recherchés. À l’heure de l’intelligence artificielle, ce livre est bien humain et porte en lui plus de philosophie que l’auteur ne voudra bien l’admettre.

Quel livre jubilatoire. Ce roman est aussi drôle que subversif. Une prostituée qui se met à faire des miracles au coeur des Etats Unis puritains et obnibulés par l'argent. Trump et les évangélistes. Dans cette société où Dieu est une marque et la foi un business, une prostitutée sainte ça dérange. Mais Stella n'est pas Marie-Madeleine. Elle ne lave pas les pieds, elle fait l'amour, elle aime faire l'amour et le plaisir qu'elle donne répare les corps abîmés tout cela dans un pays ultra puritain. Ca dérange encore plus. Branle bas de combat au Vatican, qui, par l'intermédiaire du cardinal Jérémy Carter (dit Jimmy Carter) , va vouloir remettre de l'ordre dans tout ça. On ne va pas en faire une sainte mais une martyre. On fait appel à une gestionnaire de tueurs, belle et cynique, qui va dépêcher deux types pas tibulaires mais presque pour faire le sale boulot. James Brown, ex navy, devenu prêtre sera celui qui protège car il connaît les rouages de sa pieuse hiérarchie. Stella, quant à elle, est lumineuse, naïve, généreuse, fait des résorptions et non des miracles. L'auteur s'invite par moments pour commenter ce qui se passe et se crée de ce fait un personnage qui dirait des didascalies. Je venais de lire "Lire Lolita à Téhéran" et note que dans ces deux livres, la religion est un pouvoir sérieux et répressif. Dans les deux romans, la figure féminine est perturbatrice. Stella comme Azae Nafisi et ses étudiantes dérange simplement parce qu'elle existe et vit en dehors des règles établies par la religion. J'avais déjà beaucoup aimé de Joseph Incardona "La soustraction des possibles" et j'ai adoré "Stella et l'Amérique". C'est un auteur qui sait allier l'absurde et le sociétal.

Accrochez-vous : voici un roman complètement barré, jubilatoire, qui traverse l’Amérique comme un road-trip sous acide. Stella, c’est une Suissesse un peu paumée, un peu rêveuse, qui décide de partir à la conquête des États-Unis… mais version Incardona, donc attendez-vous à de l’absurde, du mordant et beaucoup d’humour noir. Ce roman est à la fois une parodie, une satire sociale et une véritable aventure humaine. On y croise des personnages hauts en couleur, des situations improbables et une critique bien sentie du rêve américain. Le tout avec une plume vive, piquante et sacrément drôle ! J’ai ri, j’ai été surprise, j’ai parfois levé les yeux au ciel (volontairement !), mais je me suis laissée emporter par ce voyage aussi loufoque qu’inattendu. Un OVNI littéraire à découvrir si vous aimez l’ironie, les décalages et les livres qui ne ressemblent à aucun autre. #129523; Bref, embarquez avec Stella pour un trip qui ne vous laissera pas indifférent·e. Promis, l’Amérique n’aura plus la même saveur après ça.

Efficace, marrant avec une pointe de méta. L'auteur nous garde avec lui sans abuser du suspense ou de rebondissements farfelus. Un polar comme je les aimes dans la même veine que Jacky Schwartzmann. Chaudement recommandé pour une lecture détente.