Bénie soit Sixtine : Le livre de Maylis Adhémar

Sixtine-enfant est joyeuse. Elle découvre les rites, coutumes, prières de sa communauté catholique si parfaite et si proche de la volonté de Dieu. Elle participe aux camps, apprend ses cantiques et s'amuse avec les enfants partageant les mêmes valeurs. Elle suit le mouvement sans se rendre compte que la manipulation est déjà en marche. Sixtine-adolescente est rêveuse. Elle cherche le prince charmant en toute innocence, se repend d'avoir parfois des pensées malsaines, se rend dès que possible au confessionnal pour obtenir le pardon de Dieu et les conseils si censés des Frères de la Croix. Elle respecte les règles, fait pénitence, aligne les chapelets, s'habille chastement. La manipulation fait son oeuvre. Sixtine-adulte est tiraillée. Mariée à Pierre-Louis, elle cherche à correspondre à tous ses désirs ainsi qu'à ceux de sa belle-famille. Ses propres besoins, ses désirs, elle les cache sous un manteau de honte. Seule compte la volonté de Dieu à travers ceux qui l'entourent. Epouse parfaite, elle participe au devoir conjugal avec recul et déception. Aux yeux de Pierre-Louis, elle est transparente. Le miracle arrive. Pas par l'opération du Saint-Esprit. Sixtine-enceinte est face à un drame qui va changer sa vie. A partir de là, elle va lutter, tantôt contre les dogmes qui lui ont été imposés, tantôt contre ses envies et besoins de liberté qui s'installent en elle et font une place de plus en plus grande. Sixtine est une femme de notre temps avec des principes d'un autre âge. C'est une femme en prise à une idéologie religieuse tenace et vorace. C'est un exemple de courage à qui la vie va faire une fleur. Il ne tient qu'à elle de la faire éclore. Ma lecture a été empreinte de reconnaissance envers mes parents qui m'ont transmis de belles valeurs religieuses, qui m'ont accompagnée à la découverte de rituels bienfaisants et qui ont respecté mes doutes, mes soifs de liberté et mes envies de nouvelles expériences. Lorsqu'un roman magnifiquement bien écrit rejoint mon intérêt et ma passion pour tout ce qui touche aux idéologies et dérives sectaires, je me laisse totalement séduire. J'ai été ravie de découvrir la plume intelligente et les propos pertinents et documentés de Maylis Adhémar. «Tous ensemble, nous devons nous engager à éliminer ce qui prive les hommes et les femmes du trésor de la liberté." Pape François

Livre découvert à partir d'un téléfilm. Le livre est d'ailleurs beaucoup plus subtil que sa version cinématographique. L'auteur nous plonge dans un univers que l'on sait exister mais dont on n'imagine pas la violence. La reconstruction de Sixtine est très belle.

Enfin ! Enfin une lecture cinq étoiles. Je commençais à croire que ça n’arriverait plus. J’ai beaucoup aimé les derniers romans que j’ai lus mais je n’ai pas eu de coup de cœur à cinq étoiles. Et c’est avec Bénie soit Sixtine qu’il est arrivé. Enfin ! Encore un livre acheté sur un coup de tête suite à une critique sur Babelio et je dois dire que je savais avant même de le commencer que j’allais beaucoup apprécier ce roman. L’histoire de Sixtine est une histoire qui me parle ayant grandi dans un milieu très religieux, pas franchement moderniste, entre les messes tous les dimanches, le catéchisme tous les samedis et la très (trop) longue prière du soir. Aujourd’hui agnostique, je n’ai pas beaucoup de bons souvenirs de la pratique de la religion. Bref, cette « pratique » constitue une grande partie de la vie de Sixtine, tout ça plus la terreur du péché, l’abstinence, la pénitence et… l’homophobie, le racisme, le mépris des « païens », etc. Ben oui, parce que « tu aimeras ton prochain comme toi-même » seulement si ton « prochain » te ressemble et fonctionne comme toi, sinon ça ne marche pas, c’est bien connu. Donc voilà le milieu dans lequel Sixtine évolue, ça plus le mariage avec un garçon de « bonne famille » (mais qui aime quand même la baston, sinon c’est pas drôle) et le premier bébé d’une longue descendance fabriqué dans la foulée (parce que c’est le principal rôle d’une femme…). Un milieu traditionnaliste et intégriste, bien sûr, où s’écarter du « droit chemin » est tellement mal vu qu’il autorise à renier ses enfants… ou ses parents (« Tu honoreras ton père et ta mère » seulement s’ils partagent ta foi et tes idées extrémistes, sinon c’est mort). Bon, le roman ne s’arrête pas là, évidemment, et Sixtine sera confrontée à des situations très difficiles, seule. Seule encore, elle va questionner les préceptes qui lui ont été inculqués, rencontrer des personnes qui vont lui permettre de remettre en question nombre de ces préceptes et peut-être qu’elle pourra prendre un chemin différent de celui qui était tracé pour elle. J’ai trouvé ce livre magnifique, bien écrit, et je me suis franchement attachée au personnage de Sixtine. C’est une femme bien plus forte qu’elle n'y paraissait, au début, quand elle a épousé Pierre-Louis Sue de La Garde, comme ça, parce que c’est ce qu’on attendait d’elle à ce moment-là. J’ai aussi beaucoup aimé les lettres d’Erika à Muriel – lettres qui recèlent des secrets inavouables. Elles sont tristes, mais tellement belles et pleines d’amour… Ce roman fut donc un très beau moment de lecture et bénie soit Sixtine pour ces cinq étoiles tant attendues !

J'ai croisé Bénie soit Sixtine deux fois ces derniers mois, la première fois en recommandation sur ce site, la seconde fois lorsque des extraits du téléfilm sont apparus sur mon feed Instagram. Peut-être était-ce un signe, sinon un clin d'œil, car cette lecture a été un vrai plaisir ! Sixtine, 19 ans, issue de la bourgeoisie rennaise, catholique, se marie à Pierre-Louis Sue de la Garde, très bon parti, très pieux, trop peut-être. Commence alors le calvaire de Sixtine: belle-famille passant aux cribles ses gestes, ses paroles, ses pensées, communauté omniprésente, mari choisissant tout pour elle. Alors un jour, Sixtine part. On entend souvent parler des cathos extrémistes, racistes, droitistes, surtout quand rentrent dans la conversation l'homosexualité, l'avortement, les autres religions, sans parfois réaliser le niveau d'endoctrinement et de pression communautaire subis. Sixtine nous plonge dans ce monde à part, un monde très huppé, très au-dessus des problèmes, très codifié, où la femme dépend des décisions de son mari, des femmes de son entourage, des heures de prières, des chapelets, des mots des confesseurs; où tout doit être parfait, sans pli, sans larme, sans déprime. Souffrir pour Dieu, pour les autres, sourire, se penser dans le vrai, là haut dans sa petite sphère dorée. Prison dorée devrait-on dire, dans laquelle Sixtine touche les bas-fonds, pressée par sa mère, sa belle-mère, les femmes de sa communauté. Où elle n'est ni libre de choisir le prénom de son fils, de refuser la visite de ses frères et sœurs de prière, de prendre une tisane favorisant l'accouchement, de donner la vie sans douleur, de parler même de ses craintes. Dieu reconnaîtra les Siens. Plongée dans les pensées d'une population d'extrême droite, xénophobe, homophobe, raciste, craignant la chute de la France, fille de l'église catholique. Pensées qui, à défaut de justifier, de valider, expriment les motivations de cette Milice allant jusqu'à tuer des gauchos, comme ils disent. Pensées que Sixtine partage sans vraiment les comprendre, enfermée dans sa petite maison bourgeoise, enceinte, entretenue. Puis Pierre-Louis disparaît. Et là, c'est le début de la renaissance. L'ultime débordement de sa belle-mère. Et Sixtine part. J'ai exulté, comme si c'était moi qui partait. Oui, Adhémar a réussi ce pari de me faire ressentir Sixtine, de m'aider à me confondre en elle. Et forcément j'ai adoré la partie où elle découvre l'indépendance, loin des règles, des chapelets à heures fixes, des pénitences exagérées, une indépendance qui ne renie pas sa foi, mais qui se fond en elle. Même si cette partie peut paraître extrême parfois (Sixtine passe des bourgeois coincés aux punks délurés, pourquoi pas). Un roman vraiment très intéressant, qui se lit tout seul, qui traite sans clichés et avec pudeur le renouveau d'une femme embrassant la foi avec confiance et amour. Une foi saine, comme elle devrait toujours le rester.