La Confusion des sentiments : Le livre de Stefan Zweig

Après les profondeurs de Germinal de Zola, d'autres profondeurs : celles de l'âme humaine. Et c'est l'incroyable "Montaigne de Stefan Zweig qui m'a dérouté en ces lieux... Rarement je replonge dans un roman. Et ici cela s'est produit par accident : je ne me rappelais tout bonnement pas d'avoir déjà lu ce roman. C'est donc que la première lecture ne m'avait pas plus marqué que ça, malgré un fort joli titre. Mais rapidement je me suis rendu compte que j'étais déjà passé par cette université d'une petite ville allemande. Que j'avais déjà côtoyé ces étudiants et leur Maître incontesté. Certaines scènes visiblement avaient quand même imprégné ma mémoire, comme celle à Berlin où le père arrive à l'improviste dans la chambre du soit disant étudiant, ou celle de la baignade. Par contre, pas moyen de me souvenir du dénouement (les méandres de la mémoire ont parfois...) Sans doute parce que la naïveté et l'aveuglement du jeune homme me semblaient un peu gros quand même... on a beau à ces âges avoir une vision flou de l'âme humaine, on sait quand même que tout homme, grand ou pas, est avant tout porteur d'une bite. Mais je ne voudrais pas là entacher ce roman délicat. A cette deuxième lecture, je sais à présent que cet ouvrage trouvera sa place dans ma bibliothèque intérieure, celle qui me suit partout, celle où je pioche inconsciemment dans ma vie de tous les jours. Pour le tableau de ce trio (mari-femme-amant) plus complexe que tout ce que je connaissais dans le domaine, pour la délicatesse d'une écriture qui rencontre une autre délicatesse, celle de dire les êtres et leur complexité.

Pourquoi faut-il lire La Confusion des sentiments de Stefan Zweig ? Outre l'écriture merveilleuse de son auteur, et sans trop vous dévoiler de l'intrigue, ce que je peux vous dire est qu'il s'agit d'un grand ouvrage qui place en son centre les thèmes des relations amoureuses en les confrontant aux mœurs de l'époque ainsi qu'à la législation en place. Un pari risqué quand on sait que ce livre est paru en 1927, mais réussi puisqu'il a connu un succès retentissant. Après trente ans de carrière, il est temps pour ce professeur de partir à la retraite. Pour célébrer l'occasion, ses collègues lui offrent un album qui retrace toute sa vie professionnelle. Dans ce livre, « tout y est vrai, seul y manque l'essentiel ». En faisant appel à sa mémoire ainsi qu'à ses souvenirs, ce professeur nous raconte sa rencontre avec son « maître » qui a fait de lui ce qu'il est. Le mystère qui habite cet homme cache en vérité un lourd secret que l'auteur nous dévoilera à la fin du roman. La confusion des sentiments réside en ce que ce maître fera naître chez ce professeur. C'est un roman sublime que je vous invite à lire sans attendre.

J’ai été touché par le style de Stefan ZWEIG d’autant plus que c’était la première fois que je le lisais. L’approche que fait Roland du monde m’a touché, moi qui me vois dans ses traits. La relation qu’il a avec son maître est comme un pharmakon, il ne peut se passer de sa présence bien qu’il l’étouffe tant et en même temps sans lui, il est asphyxié. [La relation presque soupçonnée entre Roland et la femme du maître m’a fort plu, ils sont tous deux victimes conscientes : l’un parce que amoureux de son charisme, l’autre, devenue amoureuse machinalement d’une personne qui n’avait pourtant aucun intérêt pour son genre. La révélation finale ne m’a pas surprise alors qu’elle était pourtant renversante, mais j’ai été touché par l‘intérêt que l’auteur porte pour le rejet des homosexuels dans une société qui les considérait comme malade.] La confusion des sentiments, même si elle est une de mes premières lectures de 2025, fera facilement partie de mes meilleures découvertes de cette année. J’ai hâte d’apprendre davantage sur le style de ZWEIG.

De la haine, de l'ambivalence, du respect, de l'admiration mais surtout de la confusion... des sentiments Traiter ce livre de chef d'œuvre ne serait même pas assez pour le décrire. Une écriture juste et passionnée qui se lit en seulement quelques petites heures, sans voir le temps passer