Rwanda, à la poursuite des génocidaires : Le livre de Thomas Zribi, Damien Roudeau

Une BD très complète qui permet de comprendre les enjeux du génocide des Tutsi. Avec pédagogie, les auteurs reviennent sur les massacres de 1994 au Rwanda, qui ont fait plus de 1 million de morts. On comprend la logique génocidaire et la haine qui existait entre les ethnies Tutsi et Hutu et qui était déjà présente dans les discours. Cette haine a été instrumentalisée par le pouvoir colonial qui a cherché à établir une hiérarchie entre les ethnies. On voit comment le génocide était organisé par le pouvoir Hutu et comment chaque responsable politique a exécuté les consignes d’extermination, comment le pays été divisé et ravagé. Ce sont des passages difficiles mais nécessaires pour comprendre ce qu’il s’est passé mais aussi pour le devoir de mémoire. Ce devoir de mémoire est l’une des missions que s’est donnée le couple Gauthier dont l’épouse a perdu sa famille lors du génocide. On voit leur désir de conserver la mémoire des disparus et de redonner leur humanité aux victimes. L’autre combat qu’ils mènent est la condamnation des génocidaires. Beaucoup restent aujourd’hui impunis et se sont réfugiés en France, France qui reconnaît dans le rapport Duclert ses responsabilités lourdes et accablantes dans le génocide. Certains génocidaires se sont réfugiés en France, où ils sont parfaitement intégrés au niveau socio-professionnel. Le couple n’est pas animé par une soif de vengeance mais par un désir de justice. Ils se heurtent cependant à la lenteur de la justice, au manque de preuves matérielles et aux divers bâtons qu’on leur met dans les roues. L’impunité des coupables représente une violence supplémentaire car elle sonne comme la non-reconnaissance des traumatismes des survivants : le choc post-traumatique, la culpabilité, la difficulté à se reconstruire. En prime, une très belle préface Gaël Faye, qui a déjà écrit sur ce génocide. Cette BD montra la démarche courageuse et éprouvante des Gauthier. Je vous conseille cette lecture forte, qui ne nous laisse pas indemnes, car on ne peut pas rester indifférent face aux génocides quels qu’ils soient, face à ceux d’hier comme à ceux d’aujourd’hui.