Interview
L'incontournable du polar français de retour
Publié le 17/09/2024 , par Fleuve éditions
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Jacques Saussey, l’incontournable du polar français, revient le 10 octobre 2024 avec Le Seul Coupable. En attendant la sortie de son livre, l’auteur vous en dit plus sur cette enquête durant laquelle, plus que jamais, les apparences vont s’avérer trompeuses…
1/ Dans ce nouveau roman, vous abordez la thématique de l’erreur judiciaire avec la réouverture d’une affaire classée depuis dix ans et, évidemment, vous évoquez en toile de fond les terribles conséquences et la culpabilité qui en découlent. Pourquoi ce sujet en particulier ?
Paul Kessler est un policier retraité qui coule des jours au calme dans sa maison provençale. Quand j’ai réfléchi à cette intrigue, je me suis demandé ce que je pouvais lui coller dans les pattes pour le déstabiliser. J’ai alors songé que ce flic droit, presque rigide, avait pu commettre une erreur par le passé, tandis qu’il dirigeait une équipe à la Criminelle de Lyon. Une énorme bourde qu’il serait incapable de se pardonner. Par exemple, envoyer un innocent en prison pour de longues années et, pour corser le sujet, que celui-ci y soit mort assassiné.
Là, mon personnage se retrouve à nu avec sa seule conscience pour témoin. Et totalement démuni. La culpabilité de s’être trompé le ronge tout autant que son impuissance. Alors une évidence trace son chemin dans son esprit : il va réparer les torts qu’il a causés, il va trouver le vrai coupable. Pour certains, il est trop tard. Lui, en revanche, considère qu’il n’y a qu’en affrontant ses démons que l’on parvient à y survivre. C’est ce point très précis que j’ai voulu creuser en tout premier lieu.
2/ Vos deux précédents livres, L’Aigle noir et Ce qu’il faut de haine, étaient ancrés dans des environnements majoritairement connectés à la nature. Ici, vous nous proposez un polar beaucoup plus urbain dans Lyon et sa périphérie. Pour quelle raison avez-vous opté pour ce décor ?
Une fois le cadre général du roman établi, Paul Kessler devait revenir trouver les membres de son ancienne équipe de la Criminelle lyonnaise et se confronter à eux. Je n’avais par conséquent pas d’autre choix que de situer plusieurs scènes clés dans la ville. Néanmoins, le crime originel, celui sur lequel repose toute l’intrigue, s’est produit à Vaugneray, dans la périphérie campagnarde de Lyon. J’ai ainsi tout de même pu laisser libre cours à mon attrait pour les espaces naturels, bien qu’ils soient franchement sinistres dans cette histoire.
3/ Le Seul Coupable, c’est une immense toile d’araignée. Vous avez en effet imaginé une intrigue pleine de ramifications et riche en fausses pistes qui nous conduit à un final complètement inattendu. Est-ce que ce polar a été particulièrement complexe à construire ?
La complexité a été de rendre chaque fausse piste crédible. C’est un jeu de longue haleine où rien ne doit être laissé au hasard ni abandonné au coin d’un paragraphe. Les mobiles, les caractères, le passé des personnages secondaires : tout revêt une importance capitale pour que l’imbrication soit parfaite.
Au début du roman, on apprend que celui qui a été condamné n’était pas le bon. Tout l’enjeu, alors, c’est de trouver qui a commis cet horrible crime sur une jeune femme, dix ans plus tôt, si ce n’est pas son petit ami qui avait déjà eu affaire à un juge pour l’avoir frappée, seul coupable envisagé et coupable idéal s’il en est…
J’apprécie souvent de dévoiler le profil du criminel très tôt afin que le lecteur puisse suivre le cheminement de sa pensée et vivre en direct ses terribles méfaits. Dans Le Seul Coupable, j’ai procédé exactement à l’opposé. Le véritable meurtrier n’est démasqué que très tard, au moment où même le plus aguerri des amateurs de polars aura théoriquement cessé de le chercher et prendra la révélation de plein fouet. C’était en tout cas mon ambition en écrivant ce livre.