Sélection
Le polar français
Publié le 06/11/2023 , par Babelio

Face aux écrivains anglo-saxons, les auteurs de polar français n'ont pas à rougir, loin de là. L'Hexagone compte en effet des dizaines de poids lourds du genre, auxquels viennent s'ajouter chaque année les nouveaux talents repérés par des éditeurs attentifs. Il faut dire que l'Histoire mouvementée du pays et son nombre record d'homicides à l'échelle européenne (en 2020 et en nombre absolu), ainsi qu'une tradition policière bien ancrée, ont de quoi inspirer les écrivains.
Dans cette sélection de coups de coeur des lecteurs de Babelio, vous trouverez de très grands noms (Pierre Lemaitre, Frédéric Dard ou encore Olivier Norek) en compagnie d'auteurs à la trajectoire ascendante (Céline de Roany, Antoine Renand, Cécile Cabanac…) qui ont su se forger une réputation en très peu de livres. Vous croiserez des psychopathes fort cruels, des victimes pas si innocentes, et des inspecteurs déterminés - et souvent tourmentés. En bref, tout ce qui fait le sel d'un polar réussi, qu'on ne lâche pas avant d'en avoir tourné la dernière page.
Tout le monde peut-il se rendre coupable du pire, comme l’annonce d’entrée de jeu la quatrième de couverture ? C’est en tout cas l'idée qu’explore Cécile Cabanac dans ce roman mettant en scène des policiers aux prises avec un probable tueur de flic. Le corps d’une ex-policière particulièrement coriace et en quête continue de justice est en effet retrouvé dans la cave d’une maison. Impossible de ne pas faire le lien avec les affaires non résolues de cette ex-policière de choc.
clemaufildespages y a retrouvé tout ce qu’elle aime dans ce type de romans : « Une intrigue à multiples facettes, impossible à lâcher et qui m'a vraiment bluffée. Le tout fonctionne parfaitement, j'ai eu comme le sentiment que ce thriller avait été écrit pour moi. »
2. Dans les brumes de Capelans de Olivier Norek, Pocket
Deux fois lauréat du prix Babelio catégorie Polar (en 2019 et 2022), Olivier Norek est devenu un auteur phare de la scène littéraire. Ses thrillers sont très appréciés par la communauté. Très attendu, ce nouveau tome des enquêtes de Victor Coste (après la trilogie 93) nous fait débarquer sur la petite île française de Saint-Pierre, située au large du Canada. Le capitaine Coste y vit en résidence surveillée, exerçant toujours mais sous couverture des missions classées secret défense. Quand la victime rescapée d'un serial killer le rejoint dans le cadre du programme de protection des témoins, le quotidien de Coste en est évidemment chamboulé. En plus de la protéger, il va essayer de comprendre comment Anne a pu s'en sortir après 10 ans de captivité, et découvrir qui elle est vraiment.
Une enquête prenant pour cadre un lieu exotique dont Norek a soigné l'ambiance, et notamment l'évocation de ce phénomène unique des brumes de Capelans qui donne son titre à l'ouvrage. Un polar haute tension salué par les lecteurs, dont gruz : « Dans les brumes de Capelans est un thriller à part, qui joue avec tous les codes du genre tout en se réinventant. Une stupéfiante réussite qui plonge le lecteur en mode survie. Dans le doute, en plein brouillard. Mais avec un Olivier Norek en parfait guide d'aveugle. Tout simplement épatant et indispensable. »
Céline de Roany poursuit les aventures de Céleste Ibarbengoetxea (Ibar pour les intimes), son héroïne fraîchement débarquée dans la littérature policière. Et c’est une affaire particulièrement difficile qui attend cette flic à la personnalité bien trempée, capitaine de police à la PJ de Nantes, et Ithri Maksen, son lieutenant : débusquer le monstre qui mutile et assassine des femmes dans le Parc naturel régional de Brière, près de Nantes. Une affaire d’autant plus délicate qu’elle fait écho à la violence vécue par Céleste dans son passé. Un polar qui aborde avec subtilité les questions relatives au corps des femmes et à la parentalité.
Outre Céleste Ibar, leslecturesdadrienne a eu un coup de foudre pour tous les personnages de ce roman : « Un polar féminin (ET féministe) addictif, au style vif et factuel, mais avec l'empathie et les émotions d'un roman. Des personnages humains et réalistes, qui traitent des stéréotypes de la femme au sens large du thème mais sans tomber dans les clichés. »
Cette fois-ci, Pierre Lemaitre troque sa plume d’écrivain contre celle de lecteur passionné de polars et romans noirs. Ajoutant une nouvelle brique à la collection des « Dictionnaires amoureux », l’auteur multi-primé confie sa propre définition de la littérature noire ainsi que ses lectures coups de cœur, décrit l’histoire et les différents styles du genre, indique les auteurs et autrices à suivre (ou à éviter) selon lui. Une mine d’or pour les amateurs et amatrices, à consulter régulièrement pour piocher le prochain livre de sa pile-à-lire.
soniaboulimiquedeslivres a été ravie de découvrir les nuances du polar selon Pierre Lemaitre : « C'est un magnifique voyage alphabétique, où l'auteur nous partage son univers. Il se livre au lecteur, de manière à la fois ludique, récréative, mais aussi instructive et intime, décortiquant sa passion. Cet inventaire personnel permet au lecteur d'élargir son propre horizon. C'est un vase communiquant où chacun y trouve son compte. »
Se faire une place dans le cénacle des auteurs de polar français en un seul livre, mission impossible ? Pas pour Antoine Renand. Avec L'Empathie, il signe une entrée fracassante dans le genre en quelque 500 pages. Il faut dire que le personnage d'Alpha, psychopathe qui se découvre violeur tortionnaire sur le tard, a de quoi marquer les esprits, vu la cruauté dont il fait preuve. On y découvre aussi les capitaines de police Rauch et Mesny, de la « brigade du viol », un duo peu épargné par l'existence. Alternant le présent et le passé, l'enquête et l'analyse psychologique, le récit déroule l'histoire de personnages inoubliables, que les lecteurs ont eu du mal à quitter malgré leur degré de violence. Un effet secondaire de l'empathie ?
Une réussite totale pour Rebus : « Antoine Renand nous livre un thriller de haute qualité : dur, violent, atypique. La psychologie, le passé des personnages et leur évolution donnent une couleur particulière à ce roman, qui porte bien son nom : l'empathie, jusqu'à sa limite, jusqu'à sa frontière. Tout n'est pas blanc ou noir, chacun a sa part d'ombre, parfois très très sombre. C'est rythmé, c'est bien écrit, c'est addictif. Un excellent thriller. »
L'Empathie - Tome 2

Plusieurs années après l'affaire Alpha, c'est dans une unité toujours traumatisée que Margot Tréabol rencontre le commandant Euvrard pour intégrer le 2e district de police judiciaire, la " brigade du viol ".
Accompagnée de son collègue Théo, Margot mènera l'enquête dans le milieu des discothèques, où un prédateur pique des jeunes femmes avec des seringues remplies de GHB, avant d'abuser d'elles.
Parallèlement à cette traque, Serflex, un violeur en série qui sévissait par cycles depuis vingt-cinq ans, réapparaît. Son mode opératoire : écrire à ses futures victimes pour les prévenir qu'un jour il s'en prendra à elles. Dans un mois ? Un an ? Dix ? Afin de les plonger dans la terreur ; dans une torture psychologique, avant la potentielle torture physique.
Pour les forces de police, ce monstre demeure un mystère. Y compris pour un ancien flic, ayant autrefois travaillé sur ce dossier : Anthony Rauch.
Ne vous fiez pas au titre, les gentils n’ont pas leur place dans ce roman. Car ce n’est pas l’histoire d’une parentalité heureuse que nous raconte Michaël Mention, mais celle de la douleur incommensurable de faire le deuil de son enfant. Mais cela, Franck, son personnage principal, ne peut s’y résoudre. Et on le comprend : au mauvais endroit, au mauvais moment, sa fille succombe à ses blessures survenues lors du braquage d’une boulangerie.
Dès lors, Franck n’a soif que d’une chose : justice, ou plutôt vengeance. Son seul indice pour retrouver le meurtrier ? Un symbole Anarchie tatoué sur son épaule. De Paris à Marseille en passant par la jungle amazonienne, le voilà embarqué dans un road-trip dont l’issue sera, il l’espère, sanglante... Percutante, acérée comme un cutter, la plume de Michaël Mention correspond parfaitement à l’histoire et à la violence qu’il imagine.
Un roman mené tambour battant selon marina53 : « Sur fond de rock, ce road-trip, essoufflant, suintant, oppressant et au rythme effréné, ne souffre d'aucun temps mort. L'écriture, vive, parfois saccadée ou effrénée, renforce cette impression d'urgence, de vie ou de mort, nous immerge d'autant plus dans cette ambiance pesante, sanglante, violente et douloureuse. La fin, mettant en scène un tragique fait divers, se révèle d'une force incroyable. »
Delphine, étudiante lyonnaise, aime vivre la nuit - bars, soirées, tout ce qui déroge à l’éducation stricte qu’elle a reçue. Mais à trop jouer les noctambules, on mène une vie dangereuse. Un soir, la jeune fille décide de suivre une femme brune à l’aura mystérieuse… Elle se retrouve attachée à un radiateur, prisonnière dans un lieu inconnu, puis rejointe par une de ses connaissances, qui ne survivra pas à leur enfer. Le capitaine Romain Mendier doit faire face à ce dossier délicat : Delphine, seule rescapée, a perdu la mémoire… Ou presque, puisque l’image d’un homme en noir la hante. Pour retrouver le coupable, il faudra plonger dans les tréfonds des souvenirs… mais peut-on vraiment s’y fier ?
musemania a su apprécier la touche particulière de Chrystel Duchamp : « Reine de la manipulation, Chrystel Duchamp distille une bonne dose de suspense tout du long, avant un final clairement explosif. Comme depuis son premier thriller, le milieu de l'art y trouve sa place et en fait l'une des originalités de la palette des qualités de cette autrice de poids. »
Que feriez-vous si vous connaissiez le jour de votre mort ? Y croiriez-vous ? Charlotte est une jeune femme sans soucis : elle aime ses chats, son travail, son compagnon. Pourtant, ce 28 octobre est amer. Trois ans plus tôt, elle avait consulté avec trois de ses amies un voyant, dont les prédictions s’étaient réalisées pour ces dernières. A Charlotte, il avait annoncé le jour de sa mort. Le 28 octobre, donc. Une mort violente. Paranoïa ? Réalité ? Pour la jeune femme commence une longue nuit d’angoisse… et un tueur rôde dans la ville.
Un polar qui a bien su jouer avec les nerfs de Patience82 : « J'ai lu, ou plutôt dévoré ce livre en deux jours à peine. Je suis tombée dedans, je n'en suis ressortie qu'à la fin, tenue en haleine par cette histoire complètement folle, qui rend folle la protagoniste de ce roman. Enfin... Folie ? Vous en êtes sûrs ? Peut-être pas tant que ça... Ou peut-être que si. Allez savoir ! »
Après La Sacrifiée du Vercors, François Médéline explore à nouveau la Drôme, la Seconde Guerre mondiale et ses conséquences dans Les Larmes du Reich. Nous sommes cette fois dans l'immédiat après-guerre, en 1951. Un couple de paysans est assassiné dans sa ferme, et leur fille de 11 ans disparaît. Pour comprendre ce qui a bien pu mener quelqu'un à abattre au fusil de chasse des gens sans histoire, l'inspecteur Michel va devoir remuer un passé dont personne ne veut plus parler. Il va devoir retracer les agissements des héros, lâches et traîtres durant cette guerre, alors que la région et la France entière tentent d'oublier.
Pour lehibook, voilà un livre qui revient sur cette période avec talent : « Une nouvelle fois, François Médéline nous emmène aux abords du Vercors et dans les années de l'immédiat après-guerre où abondent les stigmates de la barbarie, les secrets inavoués et les pieux mensonges. Une nouvelle fois, il explore ces zones grises de l'histoire où s'estompent et se confondent bons et méchants, traîtres et héros. En phrases courtes et brutales, en courts chapitres très rythmés, il construit un récit haletant et angoissant. »
Auréolé de plusieurs prix depuis ses débuts en 2015, Olivier Bal est aujourd’hui la nouvelle star montante du thriller français. Après L'Affaire Clara Miller et La Forêt des disparus, le personnage de Paul Green revient sur les étagères de nos librairies dans un roman choral où les points de vue s'alternent. Cette fois-ci, afin de retrouver une jeune femme portée disparue, le journaliste infiltre la communauté de l'Enceinte, une secte influente située sur les collines de Californie. Parallèlement, à Los Angeles, une femme trop méconnaissable pour être identifiée a été retrouvée morte ; l'inspectrice Sarah Shelley est alors chargée de l'enquête. Cette plongée dans la Californie de toutes les dérives, ainsi que dans les bas-fonds de Los Angeles, est aussi l’occasion pour le lecteur de pénétrer dans les arcanes des sectes et de comprendre leur fonctionnement en détail, au plus près de leur pouvoir de nuisance.
Killing79 n'a eu aucun répit lors de sa lecture : « Olivier Bal est définitivement installé sur son fauteuil d'auteur confirmé. Cette troisième aventure maîtrisée de bout en bout confirme tout son talent. Il approfondit son sujet tout en construisant un suspense qui monte crescendo. L'étau se resserre inexorablement jusqu'au finish spectaculaire. L'écrivain a trouvé sa patte et c'est du pur bonheur ! »
Laissez-vous porter par le timbre profond de la voix d’Hugues Martel pour une dizaine d’heures dans les coulisses ensanglantées d’un film d’horreur. Film maudit ? Tout pourrait porter à le supposer. Un réalisateur fou et solitaire, reclus dans les montagnes. Une étudiante en cinéma fascinée par celui-ci. Un expert en effets spéciaux retrouvé mort, ligoté dans un lit d’hôpital. Lorsque l’horreur sort de l’écran pour devenir réalité, le commandant Martin Servaz doit saisir la vérité là où la fiction prend chair, là où vous sentirez peut-être dans votre dos l'œil d’un spectateur particulier… un œil qui vous fixe.
Pour DesPlumesEtDesLivres, la rencontre idéale entre une plume et une voix : « La voix de Hugues Martel est toujours un régal pour les oreilles. Dès les premiers mots, il m'emmène aux côtés des personnages dans le tourbillon de l'horreur écrit par Bernard Minier. Il me semble difficile de découvrir les enquêtes de Martin Servaz autrement qu'en étant bercée par la voix de ce comédien… »
Lire un San-Antonio est comme un rite de passage, un pacte entre générations accompli là en laissant en vue l'une de ces couvertures inoubliables (du côté parental), et ici en le kidnappant pour le lire discrètement dans sa chambre (côté ados). Depuis 1949, le commissaire Antoine San-Antonio et son adjoint Bérurier dévergondent les jeunes (et les moins jeunes) de page en page, entre enquête policière et érotisme rabelaisien. Une verve et une gouaille désormais réunies dans une imposante intégrale chez Bouquins présentée par François Rivière. Tout le piquant de Frédéric Dard en 1600 pages (!), pour des heures de jouissance littéraire.
Ce volume contient : Le Pétomane ne répond plus · T’assieds pas sur le compte-gouttes · De l’antigel dans le calbute · La Queue en trompette · Grimpe-la en danseuse · Ne soldez pas grand-mère, elle brosse encore · Du sable dans la vaseline · Ceci est bien une pipe · Trempe ton pain dans la soupe · Lâche-le, il tiendra tout seul · Céréales killer.