Apeirogon - Collector : Le livre de Colum McCann

Apeirogon: une figure géométrique dont le nombre de côtés est impossible à dénombrer. Sans doute est-ce comme le conflit israélo palestinien. On ne sait pas par quel bout le prendre... Colum Mc Cann a écrit un biopic, genre plutôt abandonné aux écrivains de deuxième ordre; mais il a réécrit l'histoire à sa façon, deux fois 500 paragraphes, numérotés de 1 à 500 puis de 500 à 1. Ces paragraphes peuvent être d'une phrase, de trois mots, d'une demi-page, d'une page, seuls les paragraphes 500 auront la longueur d'un véritable chapitre. Le tout, balancé sans aucune chronologie. La sophistication de la forme est donc, parfois, un peu agaçante, disons envahissante. C'est l'histoire de Rami Elhanan et Bassam Aramin. Smadar, la fille de Rami, avait treize ans quand elle a été tuée au cours d'un attentat palestinien, qui fit une douzaine de victimes, dont trois fillettes; Abir, la fille de Bassam, dix ans quand elle a été abattue par erreur, dix ans plus tard, par un garde-frontières israélien. Les deux hommes se connaissaient alors, et Rami s'est trouvé aux côtes de Bassam quand il a cherché un hôpital pour sa petite dans le coma. Les deux hommes s'étaient rencontrés lors de la formation du groupe des Combattants pour la paix, initié par Ytzhak Frankenhal, dont le fils avait été massacré à Ramallah; au cours des premières réunions, israéliens et palestiniens se regardent en chiens de faïence. Smadar vient d'être tuée, et c'est son frère qui vient raconter son histoire. Quant à Bassam, il a fait sept ans de prison -et dans quelles conditions inhumaines! pour avoir, ado, jeté des pierres; puis il est parti en Angleterre pour étudier, et comprendre ce qu'est le peuple juif. Les premiers pionniers des Combattants pour la paix comprennent petit à petit que ce qui les rassemble est plus fort que ce qui les sépare; que la haine ne peut que semer la haine, qui a son tour engendrera la haine... et ainsi Rami et Bassam sont devenus de très improbables, et de très grands amis. Ensemble, ils parcoureront le monde pour présenter leur utopie à partir de leurs histoires, sous les portraits des deux petites filles Dans ces paragraphes, il y a des phrases qui reviennent, il y a le récit récurent des évènements, il y a les obsessions qui tournent et retournent dans les têtes de Rami et de Bassam, il y a le souvenir obsédant de ces moments de recherche hagarde, la petite n'est pas rentrée à la maison, mais où est-elle, de courses échevelées à travers Jérusalem... Mais il a aussi beaucoup d'histoires d'oiseaux! C'est qu'à Jérusalem, il y a d'incessantes traversées de migrateurs, et un centre de baguages de ces migrateurs. Et qui mieux que l'oiseau libre qui vole au dessus des frontières, en compagnie fraternelle d'autres espèces, pour illustrer l'utopie de l'amitié entre les peuples? Mais on voit aussi passer beaucoup de passagers clandestins: François Mitterand, Peter Brook, Jorge Luis Borges, l'explorateur Francis Burton, les musiciens du camp de Theresienstad, tous gazés après la dernière représentation, et tant d'autres, parmi lesquels on retiendra plus particulièrement Philippe Petit, le funambule qui traversera la vallée de l'Hinnom, avec le projet de lâcher, à mi-parcours, une colombe -il ne trouvera qu'un petit pigeon. Et la bestiole refuse de s'envoler, menaçant l'équilibre du balancier; sans doute n'avait elle connu que la cage.... encore un beau symbole, non? A lire absolument, surtout en ces temps difficiles: cela donne de l'espoir, s'il y avait plus d'hommes de bonne volonté?

Difficile, très difficile de parler de ce roman ! Basé sur des faits réels comme en atteste la note de l'auteur que l'on trouve au tout début du livre (cf photo), il retrace le combat de deux hommes pour la paix, pour la fin de l'occupation de la Palestine. L'un est juif, son père, rescapé de la Shoah, est arrivé en Israël en 1949. L'autre est palestinien, il a passé toute son adolescence dans une prison israélienne. Leur point commun : ils ont perdu une fille dans ce combat incessant. Smadar allait avoir 14 ans quand elle est morte soufflée par les bombes vivantes qu'étaient 3 kamikazes. 10 ans plus tard, une balle tirée par un garde-frontiere israélien, a percuté l'arrière de la tête d'Abir, 10 ans, juste devant son école. Ils auraient pu choisir la haine, ils ont choisi un autre combat. Mais ce livre est plus que ça encore. Il fourmille d'informations qu'on a parfois du mal à relier avec le sujet du roman. On remonte dans le temps, on voyage d'un point à l'autre de la planète. Les chapitres s'enchaînent, courts, parfois très très courts (cf photo). Et au milieu, leur décompte s'inverse. Une foule d'émotions m'a envahi pendant la lecture de ce roman. Parfois très diverses, peut-être même opposées. J'ai souvent eu le sentiment d'être laminée par ma lecture. D'ailleurs j'ai mis longtemps à lire ce livre. Ce qui est sûr c'est que je ressens une vive admiration pour ces hommes qui se battent à contre-courant. Et un espoir qu'un jour leur combat n'ait plus lieu d'être...

Apeirogon: polygone ayant un nombre infini de côtés. tous les angles et tous les côtés sont égaux, et les côtés ne se croisent pas. Comme l’indique le titre de ce roman, il y a différentes facettes, différentes explications, différentes vérités, différentes compréhensions, du conflit Israël/ Palestine. Cette guerre n’a pas ou très peu de chance de se régler. Les idées de chacun ne semblent pas pouvoir se rejoindre. Mais si on trouvait quelque chose de commun, quelque chose que chacun peut comprendre? C’est la mort de leurs filles qui a su rapprocher et créer une amitié , peu probable, entre Rami, juif israélien, et Bassam, musulman palestinien. Ce roman raconte le conflit qui ronge les êtres qui vivent dans cette partie du monde. Il raconte l’histoire de ces deux pères, militants au sein des Combattants pour la paix, qui se battent tous les jours afin qu'une armistice puisse être envisageable. C’est à partir de diverses entrevues avec ces deux hommes que Colum McCann à écrit son excellent roman. Un roman qui nous fait découvrir de l’intérieur, la difficulté de vivre dans les territoires occupés, de pouvoir travailler, d’aller à l’école, de rencontrer l'autre, toujours la peur constante de se faire arrêter ou de se faire tuer. Triste, dur mais tellement d’actualité ! Un Must à lire !

livre qui rentre en résonance avec la triste actualité...Rami, l'israélien et Bassam, le palestinien, ont tous les 2 perdu une fille. L'un tué par un garde frontière israélien, l'autre par un kamikaze palestinien… et au lieu de se venger ils vont sillonner le monde pour délivrer un message de paix et d'écoute. Hommage à une histoire vraie avec les témoignages poignant en milieu de livre, mélange d'histoire, de religion, de philo, de musique, c'est un livre choral, très surprenant dans sa conception, qui nous permet de mieux appréhender le conflit et entrevoir un nouvel avenir... INDISPENSABLE